Le juge qui constate un préjudice de perte de chance ne peut l’écarter en cas de demande de réparation intégrale !

Le juge qui constate un préjudice de perte de chance ne peut l’écarter en cas de demande de réparation intégrale !

Publié le : 09/09/2025 09 septembre sept. 09 2025

Le droit de la responsabilité nécessite une analyse fine des différents préjudices que peut subir la victime.

La Cour de cassation a pu se prononcer sur l’admission d’un préjudice de perte de chance dans un arrêt mêlant responsabilité et procédure civile.

Pour mémoire, la perte de chance indemnise la chance perdue de réaliser un événement favorable ou d’éviter un événement défavorable.

Elle est mesurée par rapport à l’opportunité perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette opportunité si elle s'était réalisée.

En l’espèce, les faits tiennent en quelques lignes. Un promoteur immobilier souhaitait faire l’acquisition d’un ensemble immobilier afin d’y aménager des bureaux. Toutefois, l’opération ne sera pas réalisable et l’acquéreur mobilisera la responsabilité du notaire au titre de son obligation de conseil.

En cause d’appel, l’acquéreur sera débouté de sa demande d’indemnisation intégrale, les juges du fond ayant relevé que le préjudice relevait d’une perte de chance et que ce dernier n’était pas invoqué dans les demandes de l’acquéreur.

La Cour de cassation censure une telle analyse, au visa des articles 4 et 1382 (devenu 1240) du Code civil, et des articles 4 et 5 du Code de procédure civile.

Les juges du droit, au terme des articles précités, déduisent que le juge peut relever l’existence d’une perte de chance alors qu’une demande de réparation intégrale lui est soumise, à condition qu’il invite les parties à présenter leurs observations.

Néanmoins, il ne peut refuser d’indemniser cette perte de chance alors qu’il l’a constatée.

Cet arrêt d’assemblée plénière fait bien entendu écho à une décision rendue le même jour portant sur des faits similaires (Cass. plén., 27 juin 2025, n° 22-21.812).

À travers ces deux décisions, la Cour de cassation est venue consolider la jurisprudence antérieure déjà favorable à la solution retenue, en estimant que : « toute perte de chance ouvre droit à réparation » (Cass. 2e civ., 20 mai 2020, n° 18-25.440).

Elle procède ainsi à une interprétation extensive du principe dispositif, en conférant des pouvoirs étendus au juge, contrairement à ce que certaines jurisprudences avaient parfois pu décider (par exemple : Cass. 1re civ., 30 avril 2014, n° 12-21.395).

Toutefois, cette lecture extensive est justifiée par la nature même de la notion de perte de chance, découlant directement du préjudice initial.

Désormais, le juge pourra donc, sans dénaturer l’objet du litige, relever l’existence d’une perte de chance, maximisant ainsi les chances pour la victime d’obtenir une indemnisation de son préjudice.

Ces principes formulés par la Cour de cassation ne semblent néanmoins pas formuler une obligation pour le juge de rechercher une éventuelle perte de chance, mais seulement de l’indemniser si ce dernier décide de la relever.

Dès lors, les parties devront néanmoins analyser finement le dossier et solliciter, ne serait-ce qu’à titre subsidiaire, l’indemnisation de la perte de chance lorsque l’occasion s’y prête. En l’absence d’une telle diligence, la partie s’expose à ne pas être indemnisée si le juge ne relève pas ladite perte de chance.


Référence de l’arrêt : Cass. Plein, 27 juin 2025, n° 22-21.146
 

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